jackguitar

la guitare éclectrique de Jacques Vannet

Jack a dit...

Façon de composer

Je ne cherche pas à relever des défis. J'ai une imagination musicale très concrète. J'entends de la musique, naïvement. Je l’écoute dans mon cerveau, dans mon oreille intérieure. Le premier pas est toujours intuitif. Après vient la phase critique. celle du filtrage. J'élimine tout ce que, subjectivement, je juge mauvais. Je corrige, réécris, modifie ce que j'avais imaginé ; il y a une sorte de feedback, d'aller-retour, si bien que le résultat final n'est pas pareil à ma conception première. Notez que ce n'est pas moi qui ai inventé cette méthode ; j'ai lu que Debussy faisait de même. Par conséquent j'écris peu, ou plutôt j'écris beaucoup avant d'arriver à une composition, des centaines de pages d'esquisses que je jette ensuite. Je suis un peu comme un scientifique qui travaille dans la recherche fondamentale, ce qui veut dire : on a des problèmes, on cherche à les résoudre, mais quand on les a résolus on en découvre cent nouveaux. Sauf que dans 1'art, il n'existe pas de problèmes, mais des réalisations.

György Ligeti (2018). Au cœur de la création musicale , La Bibliothèque des Arts

Jouer du jazz ?

Etre né quelque part

Si vous n’êtes pas nés à la Nouvelle-Orléans ou à Kansas City, serez-vous capable de jouer du jazz ? Je pense que c’est possible mais que ça ne sera pas donné…

Jouer du jazz

On me demande régulièrement « je voudrais jouer du jazz ». Cette requête est en général assortie d’un « comme Wes Montgomery », ou George Benson, Charlie Parker etc. Ben voyons ! ;-)

J’ai moi-même longtemps essayé de jouer du jazz. Je pensais qu’il suffisait d’aimer cette musique, d’écouter des tonnes de disques, de travailler des standards, d’apprendre ses gammes, ses arpèges, quelques plans de jazz, des relevés de chorus notoires etc.

Certes, je m’améliorais et ça pouvait devenir même acceptable pour des oreilles non averties. Mais il me manquait toujours quelque chose pour être satisfait.

Un jour que je chantais une chanson en m’accompagnant à la guitare, je réalisais soudain combien j’étais à l’aise dans ce registre, substitutions d’accords, accords de passage, renversements, notes de remplissage etc. Et je compris aussitôt combien c’était différent pour un standard de jazz. J’étais incapable de le chanter avec les vraies paroles, en m’accompagnant simplement de la guitare. Certes j’aurais pû le faire mais ça ne me venait pas naturellement…

Eh oui, quand des amis passent à la maison, et que je prends ma guitare, c’est plutôt pour jouer un morceau des Beatles ou des Stones que pour fredonner All The Things You Are ;-)

Alors, si vous êtes comme moi, que vous vous souvenez de votre mère fredonnant A La Claire Fontaine sur votre berceau, plutôt que Lullaby Of Birdland, d’Aznavour chantant emmenez-moi à la radio plutôt qu’Ella Fitzgerald, alors c’est que vous êtes peut-être nés en Bourgogne plutôt qu’à Kansas City ou Manhattan, et vous n’y pourrez rien changer, vous pouvez travailler tant que vous voulez, vous ne sonnerez jamais comme Wes…

Ca finira par y ressembler, si vous êtes habile, mais vous ne serez qu’une copie. Livré à vous-même dans un chorus, vous ne ferez que réciter des plans de Montgomery…

C’est pareil pour beaucoup de musiques populaires (jazz, musique tzigane, jazz manouche, bossa-nova, flamenco, etc.) car elles sont transmises oralement par les parents, le milieu, et on apprend par imprégnation. Une musique qu’on aimera à 18/20 ans, c’est pas pareil, notre personnalité est déjà construite à cet âge, et cette musique viendra « enrichir » notre bagage mais ne pourra pas le remanier en profondeur.

Remarquez bien que ceci ne concerne que les puristes de la musique, pour le grand public, la notion d’authenticité est assez floue, et Liane Folly est une très bonne chanteuse de jazz…

Jack le Fataliste

Maintenant, si vous êtes toujours décidés à jouer du jazz, alors suivez-moi par ici…

edit : en surfant récemment, je viens de tomber sur une interview de Herbie Mann qui disait « Il est facile de jouer des phrases de jazz et de les faire swinguer. Mais jouer du jazz, c’est différent. Il y a une grande différence entre le « jazz style » et le « jazz ». Il y a beaucoup de « jazz style players » mais, à mon sens, il y a peu de création. »

à méditer…

8 réponses

  1. Sur le site de la médiathèque de la cité de la musique dans la rubrique dossiers pédagogique/entretiens filmés il y a des grands noms qui en parlent : Henri Texier/John Scofield/Martial solal/Claude Barthélémy. A voir absolument celui de Claude Barthélémy qui a une vision très intéressante du jazz notamment avec son example de sonny rollins à la guitar.

    http://mediatheque.cite-musique.fr/masc/

    1. pour avoir subi C.barthélémy à Montluçon il y a de nombreuses années je
      pense qu’il ne peut absolument pas aborder le moindre sujet concernant
      la musique car il est totalement amusical .

  2. Personnellement, ma mère écoutait Aznavour… Mais aussi les « grands » du jazz. Je ne connais pas les noms,(honte à moi) mais, ce qui est sùr, c’est que je suis imprégnée de cette musique.
    Exemple : ma mère réecoutait Ray Charles, à peine la trompette à telle sonner que je me suis dit « mais je connais cette chanson » et j’ai fredonner en chanson « Hit the Road Jack » dans ma tête…
    C’est simple, je ne connais quasiment que ce qu’écoutait ma mère : des jass man américains et leurs musiques qui swinguent et les chanteurs français qui ont fait danser nos aïeux…
    JE epnse être imprégneée de cette musique…

    1. merci de ton témoignage. On n’a pas eu la même mère ça c’est sûr ;-)
      J’aurais une question : est-ce que tu joues du jazz ? Moi aussi je pensais être imprégné de cette musique que j’ai beaucoup écoutée.
      Pour finir, je dirais tant mieux si tu a été imprégnée de jazz toute jeune mais le problème va se poser pour toi pour d’autres musiques : as-tu essayé de fredonner des mélodies bulgares ? Ou japonaises ?
      A débattre.

      Merci encore pour ton commentaire

      Jack

  3. Duke Ellington lui-même a dit de Solal qu’il possédait « en abondance les éléments essentiels à un musicien : sensibilité, fraîcheur, créativité et une technique extraordinaire ». – Martial Solal est français, né à Alger.
    Dave Holland, qui a joué avec Miles Davis, et quasiment tous les musiciens Américains depuis la fin des années soixante, est né dans une petite ville anglaise, entre Londres et Liverpool.
    Il serait possible de donner beaucoup plus d’exemples, mais le point n’est pas là: Si vous voulez parler de « culture », dans ce cas celle du gospel et du blues, alors oui, on ne peut pas dire que les musiciens blancs, et encore moins blancs européens, la possèdent. Les origines du jazz se trouvent en effet dans la population afro-américaine, ça ne fait aucun doute. Par contre, affirmer qu’on ne peut pas jouer du jazz en étant né en dehors des Etats-Unis, pardonnez-moi, mais c’est une sacrée c…!

    1. Merci Mat de cette réponse…

      mais je n’ai jamais dit que ça n’était pas possible, j’ai juste dit que ça ne serait pas facile. Nuance… De plus, dans cet article, je fais part de mon expérience personnelle par rapport à cette musique que j’aime beaucoup : j’ai beaucoup travaillé pour jouer du jazz mais malheureusement je ne suis pas satisfait du résultat…

      Par ailleurs, je pense que le problème soulevé ici n’est pas propre au jazz mais peut aussi être retrouvé dans toutes les musiques populaires qui ne font pas partie de notre culture propre (même à l’époque de la mondialisation des cultures que nous connaissons tous aujourd’hui).

      Cordialement,

      Jack

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