jackguitar

la guitare éclectrique de Jacques Vannet

Jack a dit...

La différence entre la musique et les autres arts

La musique est certainement de tous les arts celui qui dispose de la plus vaste audience. Rares sont les esprits qui lui demeurent totalement imperméables. Sensible à la musique, bonne ou mauvaise, légère ou sérieuse, presque tout le monde l'est plus ou moins, et ceux-là mêmes qui avouent n'y rien comprendre, souvent y goûtent un vif plaisir. La poésie, la peinture, la sculpture - et je ne parle déjà pas de l'architecture - sont loin de posséder pareille résonance. Et cependant, j'ose affirmer que dans une salle de concert, sur cent personnes il n'y en pas dix peut-être qui soient capables d'écouter réellement la musique.

Boris De Schlœzer (). Introduction à J.-S. BACH , Collection æsthetica, Presses Universitaires de Rennes, p. 13

La musique au cinéma n’est-elle qu’un papier peint pour le film ?

La question un brin provocatrice de Stravinski reste d’actualité pour une grande partie du public de cinéma d’aujourd’hui, qui continue d’aller voir (sic…) des films sans porter attention à leur dimension auditive ! Cette rencontre avec Thierry Jousse, un grand connaisseur de la musique de film,  a pour ambition de répondre à la célèbre citation, en présentant la fonction de la musique au cinéma, son esthétique, tout en posant des repères historiques.

Je vous présente ici le plan d’une table ronde autour de la musique de film, une rencontre avec Thierry Jousse, président du jury de la neuvième édition du festival Chalon tout court. Dès que j’aurai dérushé et obtenu les autorisations nécessaires, je publierai le podcast de cette conférence. Je laisse les questions, les commentaires sont là pour répondre ;-)

Qu’est-ce que la musique de film ?

Pourquoi y a-t-il de la musique dans les films ? > repères historiques

1895 : le cinéma muet
1920 : premières musiques originales (Saint-Saens)
1927 : le cinéma parlant (Le Chanteur de Jazz)
1930-59 : le classicisme hollywoodien (1941 Citizen Kane)
1945 : après la guerre le renouvellement : atonalité, instruments électroniques etc. Hermann, Raksin, Rosza (La maison du Docteur Edwardes)
1951-65 : le jazz
1955 : irruption des musiques populaires, rock, pop, soul, funk… (albums, compilations, etc.)
1975 : retour du symphonisme (Star Wars etc.)
1989 : numérique (banque de sons, montage virtuel, etc.)
2005 : « symphonisme intimiste » > Alexandre Desplat

Pour aller plus loin, une très belle frise animée : Histoire de la musique de film

Fonction de la musique au cinéma

Quel est le rôle de la musique au cinéma ?

Elle en a plusieurs…

Comment fonctionne la musique par rapport aux dialogues et aux bruits ?

Corollaire : Que représente la musique au cinéma ? > Prenez le film Un Condamné à mort s’est échappé de Bresson

La bonne musique de film, c’est celle qu’on remarque ou celle qui se fait oublier ?

ça se discute ;-)

Sachant que le compositeur intervient en dernier sur un film, comment est-ce que ça peut fonctionner ?

Et ça fonctionne !

  • Est-ce que le compositeur intervient toujours en dernier ?

  • Est-ce que c’est une bonne place d’arriver en dernier ?

Quelle est la « musique juste » pour accompagner un film ?

  • Musique et cinéma sont des arts autonomes qui n’ont pas foncièrement besoin l’un de l’autre, mais qui peuvent se transcender.
  • N’importe quelle musique va-t-elle vraiment avec n’importe quelle image ?

Esthétique de la musique de film

Qu’est-ce qu’une musique de film ?

On écoute une musique tirée de Carrie (Brian de Palma, 1976, For the Last Time We’ll Pray, musique de Pino Donaggio) sans les images. Pourquoi identifie-t-on immédiatement cette musique comme une musique de film ? Est-ce que toute musique peut être potentiellement une musique de film ?

Quelles sont les différences entre le fait d’utiliser des musiques préexistantes ou des musiques composées spécialement pour un film ?

Pourquoi Michel Deville ou Stanley Kubrick ont-il beaucoup utilisé les musiques existantes ? Est-ce pour garder le contrôle esthétique de leurs films (le compositeur est le seul autre artiste dans un film) ?

Kubrick demande à Alex North de réaliser la musique de 2001, Une Odyssée de l’espace, puis le remercie pour le remplacer par des valses de Strauss et un morceau de Ligeti.

Autre anecdote

Oliver Stone avait monté Platoon avec l’Adagio for Strings de Samuel Barber et a demandé à Georges Delerue de composer un morceau dans le même style, pour finalement choisir l’Adagio… arrangé et dirigé par lui.

Un bon compositeur de musique de film doit-il être seulement un bon musicien ?

à développer

N’y a-t-il pas trop de musique dans les films ?

  • Un papier peint ou un tapis sous les dialogues, sous les sons etc. ?
  • Corollaire : existe-t-il des films sans musique ?

Y a-t-il une différence entre l’usage d’une musique instrumentale ou d’une chanson dans un film ?

NB : ce sont 2 catégories distinctes aux Oscars : Original Score et Original Song

Les Oscars et les récompenses

Pourquoi cette musique a-t-elle été récompensée ? On écoute un extrait de The Shape of Water (Alexandre Desplat, The Shape of Water, film de Guillermo del Toro, Oscar 2017 Music: Original Score).

Il semblerait que les Oscars aient bien du mal à trouver les bonnes catégories pour la musique de film. La valse des catégories en musique à Hollywood…

1934

  • Music (Scoring)
  • Music (Song)

1938

  • Music (Original score)
  • Music (Music score of a dramatic picture)

1941

  • Music (Scoring of a musical picture)
  • Music (Music score of a dramatic or comedy picture)

1962

  • Music (Music score — substantially original)
  • Music (Scoring of music — adaptation or treatment)

1968

  • MUSIC (Original Score–for a motion picture [not a musical])
  • MUSIC (Score of a Musical Picture–original or adaptation)
  • MUSIC (Song–Original for the Picture) > Les Moulins de mon cœur pour l’Affaire Thomas Crown

1970   

  • MUSIC (Original Song Score) -> Let It Be

1971

  • MUSIC (Original Dramatic Score) -> Un Été 42
  • MUSIC (Scoring: Adaptation and Original Song Score)

1974

  • MUSIC (Scoring: Original Song Score and Adaptation -or- Scoring: Adaptation)

1975

  • MUSIC (Original Song)

1976   

  • MUSIC (Original Song Score and Its Adaptation or Adaptation Score)

1978

  • MUSIC (Adaptation Score) > The Buddy Holly Story

1982

  • MUSIC (Original Song Score and Its Adaptation -or- Adaptation Score)

A partir de 1999, il n’y a plus que 2 catégories :

  1. MUSIC (Original Score) > The Shape of Water —  Alexandre Desplat
  2. MUSIC (Original Song) > Remember Me from Coco  — Chanté par Tiffany Young

Le cinéma comme art sonore

Écouter de la musique de film au cinéma s’apparente assez à l’écoute de musique électroacoustique finalement, vu que la musique est toujours mêlée aux dialogues et aux bruits divers… Est-ce que les compositeurs acceptent ça de bon cœur ? Est-ce que pour autant ça prédispose le public à écouter de la musique électroacoustique ?

Polémique de Stravinsky

La musique de film existe-t-elle en dehors du film ?

Peut-elle s’écouter seule ? Est-ce que la musique de film a un style particulier ou bien ne fait-elle qu’emprunter à tous les styles selon les besoins du film ?

La musique de film n’est-elle condamnée à nous servir que des clichés émanant de la musique existante ?

Adagio for Strings de Samuel Barber se retrouve dans la BO d’au moins 23 films dont :

  • Rollerball en 1975
  • Elephant Man en 1980
  • Platoon en 1986
  • Little Buddha en 1993
  • Les Roseaux sauvages en 1994
  • Les Amants du nouveau monde en 1995
  • Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain en 2001
  • etc.

La musique de film peut-elle s’émanciper et sortir de son rôle principal de créatrice d’atmosphère et d’ambiance ?

> Nino Rota

Au cinéma, vaut-il mieux être aveugle ou sourd ?

humour

Annexes

1934 – Maurice Jaubert : L’Atalante

« Que la musique de film se débarrasse donc de tous ses éléments subjectifs, que, comme l’image, elle devienne, elle aussi, réaliste ; que, par des moyens rigoureusement musicaux — et non pas dramatiques — elle recrée sous la matière plastique de l’image une matière sonore impersonnelle […] ; qu’elle nous rende enfin physiquement sensible le rythme interne de l’image sans pour cela s’efforcer d’en traduire le contenu sentimental, dramatique ou poétique. »

Maurice Jaubert, cité dans François Porcile, Maurice Jaubert, musicien populaire ou maudit ?, Les Éditeurs français réunis.

David Raksin, d’où provient la musique dans les films ?

Hitchcock refusait toute musique pour Lifeboat (Huis-clos en pleine mer) sous le prétexte que le public ne saurait pas d’où sort la musique… Raksin lui a répondu :

« Quand vous m’aurez expliqué d’où vient la caméra qui filme la scène, alors je vous expliquerai d’où sort la musique… »

La réponse de Vladimir Cosma à Stravinsky

Il existe des écoles différentes. Vous avez l’école américaine où la musique a un rôle beaucoup plus fonctionnel, on cherche une efficacité immédiate alors que dans le cinéma européen, on essaie de faire en sorte que la musique ne soit pas tout simplement ce que Stravinski appelait « musique papier peint. » La musique doit « décorer » une scène, non pas à la manière d’un papier peint, mais plutôt comme un tableau. Un tableau est accroché dans un appartement, mais si demain vous le mettez dans un autre endroit il est toujours beau parce qu’il a par lui-même une valeur. Pour moi, une bonne musique de film a une valeur en soi et quand, tout à coup, elle intervient dans le film, elle le sert en le sublimant mais sans être uniquement fonctionnelle.
Vladimir Cosma in CINÉMA ET MUSIQUE, ACCORDS PARFAITS, Les Impressions Nouvelles, p. 44

Sources web

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